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La voie qui peut s'énoncer
N'est pas la Voie pour toujours
Le nom qui peut la nommer
N'est pas le Nom pour toujours
Elle n'a pas de nom : Ciel et Terre en procède
Elle a un nom : Mère-de-toute-choses
En ce toujours-n'étant considérons le Germe
En ce toujours-étant considérons le Terme
Deux noms issus de l'Un
Ce deux-un est mystère
Mystère des mystères
Porte de toute merveille.
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Peux-tu faire à ton âme embrasser l'Un
Dans une union indissoluble ?
Peux-tu, en concentrant ton souffle, devenir
Aussi souple qu'un nouveau-né ?
Peux-tu purifier ta vision interne
Jusqu'à la rendre immaculée ?
Peux-tu chérir le peuple et gouverner l'Etat
Sans user de subtilité ?
Peux-tu ouvrir et clore les battants du Ciel
En jouant le rôle féminin ?
Peux-tu tout voir et tout connaître
En cultivant le non-agir ?
Elève les êtres, nourris-les
Sans chercher à les asservir
Oeuvre sans rien revendiquer
Sois un guide et non pas un maître
Voilà la Vertu mystérieuse.
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Bien que trente rayons convergent au moyeu
C'est le vide médian
Qui fait marcher le char
L'argile est employée à façonner des vases
Mais c'est du vide interne
Que dépend leur usage
Il n'est chambre où ne soient percées porte et fenêtre
Car c'est le vide encore
Qui permet l'habitat
L'être a des aptitudes
Que le non-être (Principe inconnaissable) emploie.
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Ce n'est pas ton oeil qui pourrait le voir
Son nom est Sans-Forme
Ce n'est pas ton ouï qui pourrait l'entendre
Son nom est Sans-Bruit
Ce n'est pas ta main qui pourrait le prendre
Son nom est Sans-Corps
Triple qualité insondable
Et qui se fond dans l'unité
Sa portion supérieure n'est point illuminée
Sa portion inférieure n'est point obscure
Il se meut sans cesse, innommé
Jusqu'à ce qu'il ait fait retour
Dans le royaume de Sans-Choses
Forme informe, image sans corps
Evanescence illusion
En l'accueillant tu ne vois pas sa tête
En le suivant tu ne vois pas sa queue
Prend les rênes de la Voie antique
Et tu tiendras en main les contingences présentes
Savoir ce qui fut au principe
Est le point nodal de la Voie.
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« Lorsqu'un homme élevé entend la Voie, il l'embrasse avec zèle. Lorsqu'un homme moyen entend la Voie, il en prend et en laisse. Lorsqu'un homme inférieur entend la Voie, il éclate de rire. La Voie s'il ne riait, ne serait plus la Voie. Les anciens disaient : La Voie de la lumière apparaît ténébreuse, la Voie du progrès rétrograde, la Voie unie apparaît monstrueuse et la Vertu suprême abîme. La blancheur éclatante apparaît obscurcie, la Vertu qui abonde apparaît démunie, la Vertu bien assise apparaît chancelante et la Vertu vraie appauvrie. Le Grand Carré n'a pas de coins. Le Grand Vase est lent à parfaire. La Grande Musique est muette. La Grande Forme sans contours. Cachée, sans nom, la Voie soutient et accomplit. » (Lao-Tseu)
« Le Tao n’est pas seulement la Voie. Il est aussi celui qui la suit. Il est le chemin éternel que parcourent les êtres et les choses. Rien ne produit le Tao, car Il est en soi l’Etre. Il est Plénitude et Vacuité, cause et effet de tout phénomène. Tout émane du Tao, se conforme au Tao et, finalement, se fond à nouveau dans l’Unité du Tao. » (Lao-Tseu)
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« La Vie n'est pas une chose créée : Elle est. L'on ne commande pas à l'Esprit. Il souffle là où Il Lui plait. Ceux qui croient qu'il est possible d'enseigner l'Inspiration ou le Génie, d'enfermer la Beauté, la Vertu et la Vérité dans des formules, d'imposer de l'extérieur ce qui doit émaner de l'Intérieur, ceux-là sont aveugles. Leur esprit est obscur ; la révélation du Tao ne les a jamais atteints. La Vérité, la Beauté et la Vertu sont des choses qu'il faut découvrir par Soi-même. Et le salut de l'âme est comme le génie, une chose qu'on ne peut ni acheter ni enseigner. Bien que toutes les choses soient identiques en essence, chacune d'elles n'en est pas moins unique. Mais leur sort commun, c'est l'éternel devenir. » (Lao-Tseu)