AL-GHAZALI
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Al-Ghazâlî né en 1058 et mort en 1111, est un soufi d’origine perse. Personnage emblématique dans la culture musulmane, il représente le mysticisme le plus profond.
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« L’univers est constitué par deux mondes, spirituel et matériel, ou, si vous préférez, un monde des sens et un monde de l’Intelligence ; ou encore, un monde supérieur et un monde inférieur. Toutes ces expressions sont proches l’une de l’autre, et la différence entre elles, n’est qu’une question d’éclairage. Si l’on considère les deux mondes en eux-mêmes, on utilise la première expression ; si c’est par rapport à l’organe qui les saisit, la seconde ; si c’est leur relation mutuelle, la troisième expression. On peut aussi les appeler le monde de la souveraineté et de la perception sensorielle, et le monde de l’Invisible et du Royaume Céleste.[…] Le monde visible est, ainsi que nous l’avons dit, le point de départ vers le monde du Royaume Céleste, et l’avance du pèlerin sur la Voie Droite est une expression désignant cette ascension, qui peut aussi être désignée comme la Religion et le lieu où descend la Lumière qui guide. S’il n’y avait pas de relation et de connexions entre les deux mondes, toute ascension de l’un vers l’autre serait inconcevable. C’est pourquoi la Miséricorde Divine a conféré au monde visible une correspondance avec le monde du Royaume Céleste, et pour cette raison il n’existe pas une seule chose dans ce monde du sens, qui ne soit un symbole de quelque chose dans l’autre monde. »
« Pour les mystiques, Dieu fait parler chaque atome des cieux et de la terre de Son omnipotence, d’une façon telle, qu’ils entendent comment tout proclame Sa sainteté, chante Ses louanges et confesse sa propre impuissance et ce, dans un langage parfaitement clair. »
« Ainsi que le dit encore le grand mystique Abû Yazid Bistamî : « Le savant n’est pas celui qui emprunte sa connaissance à quelque livre, et qui devient ignorant quand il oublie ce qu’il a appris. Le vrai savant est celui qui reçoit, quand il le veut, sa connaissance de son Seigneur, sans étude ni enseignement. »
« Quand l’homme s’est rendu familier avec le dhikr (invocation du Nom de Dieu), il se sépare de toute chose. Or, à la mort, il est séparé de tout ce qui n’est pas Dieu. Dans le tombeau, il ne lui reste ni épouse, ni biens, ni enfant, ni ami. Seul lui reste le dhikr. Si ce dhikr lui est familier, il y prend plaisir et se réjouit que les obstacles qui l’en détournaient aient été éloignés […], de sorte qu’il se découvre comme seul avec son Bien-Aimé. Ainsi l’homme, après la mort, trouve son plaisir dans cette intimité. Puis, pris sous la protection de Dieu, il s’élève de la pensée de la rencontre, à la rencontre elle-même. »
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IBN’ARABI
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Ibn’Arabi, né en 1165 en Espagne et mort en 1240 en Syrie, est un théologien, juriste, poète et métaphysicien musulman. Il est considéré comme le plus grand des Maîtres du Soufisme.
« Quiconque vivifie une âme morte par la vie de la connaissance dans n'importe quel domaine rattaché à la connaissance de Dieu, la vivifie vraiment. Cette connaissance particulière étant pour cette âme comme une lumière avec laquelle elle marche parmi les gens, c'est-à-dire entre ceux qui lui sont pareils en forme. »
« Celui dont la langue se tait, même si son cœur ne se tait pas, allège son fardeau ; celui dont la langue et le cœur se taisent tous les deux, purifie son « Centre Secret » et son Seigneur s'y révèle ; celui dont le cœur se tait, mais dont la bouche parle, prononce les paroles de la Sagesse ; mais celui dont ni la langue ni le cœur ne se taisent est objet de Satan et soumis à sa domination. Le silence de la langue est un des traits ordinaires de tous les hommes spirituels, et de tous les Maîtres de la Voie. Le Silence du cœur est parmi les caractères distinctifs des « rapprochés » qui sont des gens de contemplation. L'état que le Silence assure aux « progressants » est la préservation des malheurs, et celui qu'il favorise chez les « rapprochés » est l'entretien dans la familiarité seigneuriale. »
« Il est prairie pour les gazelles, couvent pour les moines, temple pour les idoles, Mecque pour les pèlerins, Tablettes de la Torah et livre du Coran. Je suis la religion de l'Amour, partout où se dirigent ses montures, L'Amour est ma religion et ma foi. »
« Tandis que l'ascète se plaît à renoncer au monde, et que celui qui se confie à Dieu repose entièrement sur son Seigneur, et tandis que le désirant recherche les chants spirituels et l'enthousiasme annihilant, et que l'adorateur est tout à sa dévotion et à son effort, enfin tandis que le sage connaisseur exerce sa force d'esprit et se concentre sur le but, ceux qui sont investis de l'Autorité et possèdent la Science restent cachés dans l'invisible et ne les connaît ni « connaisseur », ni « désirant », ni « adorateur », comme ne les perçoit ni « confié à Dieu », ni « ascète » ! L'ascète renonce au monde pour en obtenir le prix, le confiant se remet à son Seigneur pour atteindre son dessein, le désirant recherche l'enthousiasme pour abolir le chagrin, l'adorateur fait du zèle dans l'espoir d'accéder à la « proximité », le connaisseur sage vise par sa force d'esprit l' « arrivée », mais la Vérité ne se dévoile qu'à celui qui efface sa propre trace et perd jusqu'à son nom ! »
« Lorsque l'homme s'éloigne des créatures ainsi que de sa propre âme, et fait taire en lui la conscience du moi pour laisser place seulement à la connaissance du Seigneur, aussi lorsqu'il se détache de la nourriture corporelle et se maintient en état de veille pendant que les autres sont plongés dans le sommeil, lorsqu'il réunit donc en lui ces quatre résultats, sa nature humaine est transmuée en nature angélique, sa servitude est changée en Seigneurie, son intelligence est convertie en faculté intuitive , sa Réalité invisible devient manifeste. »
« Celui qui unit en sa connaissance de Dieu le point de vue de la transcendance avec celui de l’immanence, et qui attribue à Dieu les deux aspects globalement, le connaît vraiment, c’est-à-dire qu’il le connaît globalement, non pas distinctement, de même que l’homme se connaît soi-même globalement et non pas distinctement. »
« Celui qui est fixé sur telle adoration particulière ignore nécessairement la vérité intrinsèque d’autres croyances, par là-même que sa croyance en Dieu implique une négation d’autres formes de croyance. S’il connaissait le sens de la parole de Junyad « La couleur de l’eau, c’est la couleur de son récipient », il admettrait la validité de toute croyance, et il reconnaîtrait Dieu en toute forme et en tout objet de foi. C’est qu’il n’a pas la connaissance de Dieu, mais se fonde uniquement sur l’opinion dont parle la Parole Divine : « Je Me conforme à l’opinion que Mon serviteur se fait de Moi », ce qui veut dire : Je ne Me manifeste à Mon adorateur que sous la forme de sa croyance ; donc qu’il généralise, s’il veut, ou qu’il détermine. La Divinité conforme à la croyance est celle qui peut être définie, et c’est Elle, le Dieu que le cœur peut contenir selon la Parole Divine : « Ni Mes cieux, ni Ma terre ne peuvent Me contenir, mais le cœur de Mon serviteur fidèle Me contient ». Car la Divinité absolue ne peut être contenue par aucune chose, puisqu’Elle est l’essence même des choses et SA propre Essence. »
« Dieu est donc le miroir dans lequel tu te vois toi-même, comme tu es Son miroir dans lequel Il contemple Ses Noms. Or, ceux-ci ne sont rien d’autre que LUI-même. »
« […] Ainsi en va-t-il pour l'Amour : un être n'aime en réalité personne d'autre que son créateur. [...] Et si tu aimes un être pour sa beauté, tu n'aimes nul autre que Dieu, car Il est l'Etre-Beau. Ainsi, sous tous ses aspects, l'objet de l'Amour est uniquement Dieu. En outre, comme Dieu se connaît Soi-même et que c'est en se connaissant Soi-même qu'Il a connu le monde, Il l'a produit « ad extra » à Son image. Ainsi le monde est-il pour LUI un miroir dans lequel Il voit sa propre image, et c'est pourquoi Dieu n'aime que Soi-même, de sorte que s'Il déclare : Dieu vous aimera, – en réalité Il est Soi-même celui qu'Il aime. »
RUMI
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Rûmî Djalâl ad-Dîn, né en 1207 en Afghanistan et mort en 1273 en Turquie, est considéré comme le plus grand poète et mystique musulman de langue persane.
« Purifie-toi des attributs du moi, afin de pouvoir contempler ta propre essence pure, et contemple dans ton propre cœur toutes les sciences des prophètes, sans livres, sans professeurs, sans maîtres. Le livre du Soufi n’est composé d’encre et de lettres ; il n’est rien d’autre qu’un cœur blanc comme la neige. »
« De même que le Souffle de l’Esprit-Saint, insufflé en Marie, lui a fait concevoir l’Enfant Divin, de même lorsque la Parole de Dieu pénètre dans le cœur de quelqu’un, et que l’inspiration Divine emplie son cœur et son âme, sa nature est telle qu’alors est produit en lui un enfant spirituel ayant le souffle de Jésus qui ressuscite les morts. L’appel de Dieu qu’il soit voilé ou non, octroie ce qu’Il a octroyé à Marie. O vous qui êtes corrompus par la mort à l’intérieur de votre corps, revenez de la non-existence à la voix de l’Ami. En vérité, cette voix provient de Dieu. Dieu a dit au Saint : « Je suis ta langue et tes yeux, Je suis tes sens, Je suis ton contentement et Je suis ton courroux. Va, car tu es celui dont Dieu a dit : « Par Moi, il entend et par Moi, il voit ; tu es la Conscience Divine. » Comment conviendrait-il de dire que tu possèdes cette Conscience Divine ? Puisque tu es devenu, par ton émerveillement, « Celui qui appartient à Dieu », Je suis à toi, car Dieu lui appartiendra. Parfois Je te dis : « C’est toi », parfois « C’est Moi ». Quoi que Je dise, Je suis le soleil illuminant toutes choses. »
« Que faire, ô Musulmans ? Car je ne me reconnais pas moi-même. Je ne suis ni Chrétien, ni Juif, ni Guèbre, ni Musulman ; je ne suis ni d’Orient, ni d’Occident, ni de la terre, ni de la mer ; je ne proviens pas de la nature, ni des cieux en leur révolution. […]. Ma place est d’être sans place, ma trace d’être sans trace ; ce n’est ni le corps ni l’âme, car j’appartiens à l’âme du Bien-aimé. J’ai renoncé à la dualité, j’ai vu que les deux mondes sont Un : Un seul je cherche, Un seul je sais, Un seul je vois, Un seul j’appelle. Il est le Premier, Il est le Dernier, Il est Manifeste, Il est le Caché ; je ne connais nul autre que « ô LUI » et « ô LUI qui est ! ». Je suis enivré à la coupe de l’Amour, je n’ai que faire des deux mondes ; je n’ai d’autre fin que l’ivresse et l’extase. Si j’ai passé un seul instant de ma vie sans Toi, de ce moment et de cette heure, je me repens. Si j’obtiens en ce monde un seul moment avec Toi, je foulerai aux pieds les deux mondes, je danserai en triomphe à jamais. O Shams de Tabriz ! Je suis si enivré en ce monde que je ne sais rien d’autre qu’ivresse et transports. »
« Quand l’homme et la femme deviennent Un, Tu es cet Un ; quand les unités sont effacées, Tu es cet Unité. Tu as façonné ce Je et ce nous afin de pouvoir jouer au jeu de l’adoration avec Toi-même. Afin que tous les Je et Tu deviennent une seule âme, et soient à la fin submergés dans le Bien-aimé. »
AWHAD AL-DIN BALYANI
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Awhad al-dîn Balyânî, originaire de la région de Shîrâz(Iran), mort en 1288, est un des plus grands Maîtres du Soufisme. Auteur de l’Epître sur l’Unicité absolue, dont voici quelques extraits.
1 - Au Nom d'Allâh, Le Tout-Miséricordieux, Le Très-Miséricordieux. La louange à Allâh, le Seigneur des mondes. De la signification de la parole du Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix ! -: "Celui qui se connaît soi-même, connaît son Seigneur."....
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3 -.... Nul ne Le voit, si ce n'est Lui ; nul ne l'atteint, si ce n'est Lui ; nul n'a de science à Son sujet si ce n'est Lui. Il se connaît Lui-même par Lui-même et Se voit Lui-même par Lui-même. Nul autre que Lui ne Le voit. C'est Son Unicité même qui est Son voile, et non pas quelque chose qui serait "autre que Lui "; c'est Son Etre même qui Le voile. Son Unicité est occultée par Son Unicité au delà de tout "comment ".
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4 - Aucun "autre que Lui "ne le voit. Il n'est pas de prophète envoyé, de saint parfait ou d'ange rapproché qui Le connaisse. Son prophète, c'est Lui ; Son envoyé, c'est Lui. Il S'est envoyé Lui-même, par Lui-même, de Lui-même à Lui-même ; il n'y a pas d'intermédiaire ou de cause seconde qui serait autre que Lui. Il n'y a pas de différence entre Celui qui envoie, ce qui est envoyé et celui à qui l'envoi est destiné. Les lettres de la Prophétie sont Son être même. Il n'y a pas d' "autre" qui pourrait cesser d'être (après avoir été) ou à propos de qui on pourrait parlé de "nom" et de "nommé".
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5 - C'est en raison de tout cela que le Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix ! - a dit : "Celui qui se connaît soi-même connaît son Seigneur ". Il a dit aussi : "J'ai connu mon Seigneur par mon Seigneur ". Ce que le Prophète indique par là, c'est que tu n'es pas "toi "mais que tu es "Lui "et qu'il n'y a pas de "toi "; et non pas qu'il entre en toi ou sort de toi, ou que tu entres en Lui ou sort de Lui. Cela ne signifie pas davantage que tu possèdes l'être et que tu es qualifié par tel ou tel attribut - non, définitivement non ! Ce qu'il a voulu dire, c'est que tu es totalement dépourvu d'être et que jamais tu ne "seras ", que ce soit par toi-même, ou par Lui, ou en Lui, ou avec Lui. On ne peut dire de toi, ni que tu cesses d'être, ni que tu es. Tu es Lui et Il est toi, sans aucune de ces imperfections. Si tu connais ton "être " de cette façon, alors tu connais Allâh ; et sinon, tu ne Le connais pas !
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6 - La plupart de ceux qui se prétendent des Connaisseurs subordonnent la connaissance d'Allâh à l'extinction de l'être et à "l'extinction de l'extinction ". C'est là une erreur et un manque de discernement manifeste ; la connaissance d'Allâh n'exige, ni extinction de l'être, ni extinction de cette extinction car les choses n'ont pas d'être et ce qui n'a pas d'être ne peut donc s'éteindre puisque l'extinction suppose l'affirmation préalable que ce qui s'éteint était. Si tu te connais comme n'étant pas et (par conséquent comme) ne cessant pas d'être, alors tu connais Allâh ; et sinon, tu ne Le connais pas !
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12 - Lorsque ce secret se dévoile à toi, tu sais que tu n'es pas "ce qui est autre qu'Allâh "mais que tu es toi-même le But de ta quête, que tu n'as nul besoin de l'extinction (pour y parvenir), que tu n'as jamais cessé et ne cesseras jamais d'être, au-delà de tout "quand" et de tout moment, ainsi que nous l'avons déjà mentionné : tu vois Ses attributs comme tes attributs, ton extérieur comme Son Nom "l'Apparent", ton intérieur comme Son Nom "le Caché", ton commencement comme Son Nom "le Premier" et ton terme comme Son Nom "le Dernier", sans le moindre doute ou la moindre hésitation à ce sujet. Tu vois Ses attributs comme tiens et Son essence comme ton essence, sans que tu aies à devenir Lui ou qu'Il ait à devenir toi à quelque degré que ce soit.
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15 - Ne pense donc pas que (pour Le connaître) tu dois d'abord cesser d'être : car si cette extinction était nécessaire, cela signifierait que tu Le voiles. Il serait par conséquent voilé par "autre que Lui ", ce qui impliquerait nécessairement qu'un autre que Lui peut l'emporter sur Lui et L'empêcher d'être vu. C'est là une erreur et un manque de discernement : ainsi que nous l'avons déjà mentionné, Son voile n'est rien d'autre que son Unicité et Sa singularité. Voilà pourquoi il est licite à celui qui parvient à la Vérité essentielle de dire : "Je suis la Vérité " ou "Gloire à moi !". Nul n'est véritablement parvenu jusqu'à Lui aussi longtemps qu'il ne voit ses attributs comme les attributs d'Allâh et son essence comme l'essence d'Allâh ; cela sans qu'il y ait infusion en Allâh ou effusion, à partir de Lui, de Son essence et de Ses attributs, et sans qu'il y ait non plus extinction par rapport à Allâh ou permanence en Lui. Il se voit comme ayant toujours été dépourvu d'être propre, et non pas comme l'ayant eu, puis perdu. Il n'y a de soi que le Soi, il n'y a d'être que Son Etre. Le Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix ! - a fait allusion à cela lorsqu'il a dit : "N'insultez pas le Temps, car Allâh est le Temps ", affirmant ainsi que la transcendance d'Allâh - qu'il soit exalté et béni - exclut tout associé, égal ou pareil.
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17 - Quand se découvre le secret d'un seul atome se découvre aussi le secret de toutes les choses existenciées, apparentes ou cachées, et tu cesses de voir les deux mondes comme autres qu'Allâh ; leurs noms et ce qu'ils nomment sont dépourvus de réalité. Ou plutôt : leurs noms et ce qu'ils nomment, et leur existence même sont Lui, sans le moindre doute. Tu ne vois pas Allâh comme ayant jamais créé une chose quelconque mais comme étant "chaque jour à une oeuvre ", laquelle tantôt Le manifeste et tantôt L'occulte, et cela en dehors de toute modalité concevable : Car "Il est le Premier et le Dernier, l'Apparent et le Caché et Il est Savant à l'égard de toute chose". Il se manifeste par son Unicité et se cache par sa Singularité. Il est le Premier par Son Essence et Son Immutabilité et le Dernier par Sa permanence éternelle. Il est l'être même du Nom "le Premier " et du Nom "le Dernier " du Nom "l'Apparent " et du Nom "le Caché ". Il est à Lui-même le Nom et le Nommé. De même qu'il est nécessaire qu'Il soit, il est nécessaire que ce qui est "autre que Lui " ne soit pas. En effet, ce que tu crois être "autre que Lui " n'est pas "autre que Lui ". "L'autre que Lui " est Lui ; Sa transcendance exclut qu'un "autre que Lui " soit véritablement "autre " : "l'autre que Lui " est Lui sans qu'il y ait réellement altérité, que ce soit "avec Lui ", ou "en Lui ", intérieurement ou extérieurement.
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28 - Celui qui comprend cet exemple sait qu'il n'y a en fait ni union, ni séparation ; que le connaisseur est Lui et que le connu est Lui ; que celui qui voit est Lui et que ce qui est vu est Lui ; que celui qui arrive est Lui et que ce à quoi il arrive est Lui. Nul autre que Lui ne parvient à Lui, nul autre que Lui ne se sépare de Lui. Quiconque comprend cela est totalement exempt de l'idolâtrie de l'idolâtrie ; quiconque ne l'a pas compris n'a pas même respiré le parfum de cette libération de l'idolatrie.
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29 - La plupart de ceux qui se prétendent des "Connaisseurs ", qui pensent connaître leur Soi et leur Seigneur et se croient libérés de l'illusion cosmique, déclarent que la voie ne peut être parcourue que par "l'extinction" puis par "l'extintion de l'extinction". Cette erreur vient de ce qu'ils ne comprennent pas la parole du Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix ! - et, croyant s'être défaits de l'idolâtrie, font allusion tantôt à la "négation de l'existence" ou à son "extinction", tantôt à "l'extinction de l'extinction", tantôt à "l'effacement" tantôt au déracinement. Or toutes ces désignations relèvent de la pure et simple idolâtrie car celui qui affirme la présence à coté de Lui de quelque chose qui est susceptible ultérieurement d'extinction, puis d'extinction de l'extinction, affirme qu'il y a un "autre que Lui ": or celui qui affirme cela Lui donne un associé - qu'i soit exalté ! Qu'Allâh nous guide et vous guide vers la Voie droite !
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30 - Tu t'es formé l'idée que tu étais toi
Or tu n'es point toi et ne le fus jamais !
Car si tu étais toi, tu serais un Seigneur
Et le second de deux. Abandonne cette idée !
Entre Son Etre et ton etre, il n'y a nulle différence.
Il n'est pas distinct de toi, ni toi de Lui.
Si, par ignorance, tu déclares que tu es autre que Lui ton endurcissement est manifeste.
Mais si ton ignorance cesse, alors tu t'affines.
Car ton union est séparation, ta séparation union
Et ton éloignement, proximité : par cela tu atteindras la perfection.
Renonce à l'intellect et comprends par la lumière du dévoilement.
Afin que ne t'échappe point ce que tu tiens de Lui.
N'associe à Allah aucune chose
Afin de n'être point avili, car l'idolâtie avilit.
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35 - Sache, en résumé, que celui qui voit et ce qui est vu, celui qui trouve et ce qui est trouvé, celui qui sait et ce qui est su, Celui qui existencie et ce qui est existencié, celui qui perçoit et ce qui est perçu ne sont qu'Un. Il voit, connaît, perçoit Son Etre par Son Etre, au-delà de toute modalité et de toute forme de vision, de connaissance ou de perception. De même que Son Etre transcende tout "comment", de même aussi la vision, la connaissance ou la perception qu'Il a de Lui-même sont sans "comment".
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38 - J'ai connu le Seigneur par le Seigneur
Sans hésitation ni doute
Mon essence est réellement Son essence
Sans imperfection, ni défaut
Il n'y a pas, entre nous, de devenir
Et mon âme est le lieu où le Caché apparaît
Depuis que je Le connais, mon âme est exempte de tout mélange et de toute corruption
Je suis parvenu à m'unir à mon Bien-aimé
Il n'y a plus ni éloignement, ni proximité
J'ai obtenu du Munificent un don
Qui n'a ni contrepartie, ni cause
Sans que mon âme s'éteigne en Lui.
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Le grand soufi Abd A-Khakiq consigna dans un document, à l'intention de son successeur, une règle de conduite à suivre pour le disciple.
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- Sois présent à chaque souffle. Respire consciemment. Ne laisse pas ton attention s’égarer, ne serait-ce que le temps d’un soupir. Rappelle-toi de toi-même en toute situation.
- Evite les faux pas. Garde présent à l’esprit le but que tu t’es fixé à chacun de tes pas. N’oublie jamais que ton désir c’est la liberté.
- Tu voyages vers chez toi. N’oublie pas que tu quittes le monde des apparences pour aller vers le monde de la Réalité.
- La solitude dans la foule. Dans toutes tes activités extérieures, garde ta liberté intérieure. Apprends à ne pas t’identifier à quoi que ce soit, c’est-à-dire, sois extérieurement avec les gens, intérieurement avec Dieu. Sois capable d’entrer pleinement dans la vie du monde extérieur sans jamais perdre ta propre liberté.
- N’oublie pas ton Ami, c’est - à-dire Dieu. Que la prière de ta langue devienne la prière de ton cœur..
- Retourne à Dieu. N’aie d’autre but que d’atteindre la Réalité.
- Sois vigilant. Ecarte toutes pensées et images étrangères. Concentre-toi sur ton activité extérieure et intérieure. Apprends à retirer ton attention des images indésirables.
- Souviens-toi. Sois toujours conscient de la qualité de la présence divine. Habitue-toi à reconnaître la présence de Dieu dans ton cœur.